Titre: Une Chouha internationale
Date : 20091210
Lieu : Casablanca, Rabat, Maroc
Résumé de l’article : Non, le Maroc n’ira pas en Afrique du Sud, ni même en Angola. Le constat est amer certes, mais c’est la réalité. En 2004, c’était l’euphorie, en 2010 c’est la déception et l’amertume. Un plat cru à la carte des Lions de l’Atlas.
Premier paragraphe : Jamais le Maroc ne s’est retrouvé dans cette situation. La Fifa vient d’annoncer le classement des équipes nationales pour le mois de Novembre 2009. Les Lions de l’Atlas sont 67ème au niveau mondial et 12ème sur le continent africain. C’est un fait historique. Depuis 1998, le Maroc n’arrive plus à se qualifier pour une coupe du monde.
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Langue : Français
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Texte : Jamais le Maroc ne s’est retrouvé dans cette situation. La Fifa vient d’annoncer le classement des équipes nationales pour le mois de Novembre 2009. Les Lions de l’Atlas sont 67ème au niveau mondial et 12ème sur le continent africain. C’est un fait historique. Depuis 1998, le Maroc n’arrive plus à se qualifier pour une coupe du monde.
Elle est finie l’époque des Zaki, Bouderbala, Timoumi, Naybet, Bassir où les Lions faisaient vraiment peur. Aujourd’hui, c’est une catastrophe. Des erreurs de coaching, des disputes au sein de l’équipe, les joueurs ne mouillent plus le maillot comme il le faudrait. Ils ne jouent plus avec le cœur. Le 14 Novembre 2009, le Maroc disputait sa dernière carte contre les Lions Indomptables du Cameroun pour une éventuelle qualification pour la CAN en Angola. Encore raté. Les marocains ont chuté 2-0 à Fès, capitale spirituelle du royaume. Ces qualifications ont montré un autre visage de la formation marocaine. Celui d’une équipe instable, perturbée et surtout sans âme. En six matchs, les Lions de l’Atlas n’ont récolté que trois points. Cette pandémie n’a pas touché que l’équipe nationale. Même les clubs chutent dans les diverses compétitions continentales comme chutent les feuilles mortes en automne. Le Raja de Casablanca n’a pas pu surclasser son homologue de l’Algérie et l’Entente Sétif a été battue en demi-finale de la coupe de la CAF. Les FAR Rabat n’ont pas fait mieux. A Benghazi, en Libye, l’équipe militaire a reçu une sévère correction. Une autre gifle pour le football marocain.
Mais que s’est-il passé ? Pourquoi ces piètres résultats ? Houcine Ammouta, l’un des quatre entraîneurs désignés pour coacher les Lions après le licenciement de Roger Lemerre, a déclaré que « la faiblesse de l’équipe nationale et ses résultats sont dus au manque de formation, surtout au niveau des jeunes ». Il est vrai que la formation est une étape importante dans le cursus footbalistique. Néanmoins, d’autres problèmes surgissent. Le manque d’infrastructures, de terrains pour pratiquer le sport, le laisser aller dans les écoles quand il s’agit d’une séance d’éducation physique, toutes ces composantes entrent également dans le processus de formation. Et si un seul maillon manque, la chaîne ne fonctionne pas comme souhaité.
Mais pourtant, en 2004 tout était si bien. Les Lions de l’atlas avaient terminé dauphin de la Tunisie, avec un peu de malchance. Etait-ce un coup de hasard ? « La finale de la CAN tunisienne en 2004, c’est un peu l’arbre qui cache la forêt » a souligné Walid Regragui, l’un des joueurs artisans de ce pseudo exploit. Entre l’entraîneur de l’époque Badou Zaki et le capitaine Nouredine Naybet, le courant ne passait plus. Même le général Hosni Benslimane, président de la fédération royale marocaine de football dans le temps, n’a pu les réconcilier. Les deux hommes avaient des égos surdimensionnés. Naybet, capitaine omnipotent et indispensable, contre Zaki, ancienne gloire du ballon rond, devenu sélectionneur sur le tas. Le bras de fer était saisissant. D’ailleurs, des spécialistes disent que c’est l’une des raisons qui a participé à l’élimination du Maroc dans la phase des qualifications pour la coupe du monde 2006 en faveur de la Tunisie. Mais ce n’était pas l’unique facteur. Cafouillis, inefficacité offensive, indiscipline technique, tout cela a précipité cette chute historique. Le duel entre les locaux et les professionnels est également un problème majeur. Au sein de l’équipe nationale, des clans se sont formés. Ceux qui évoluent en Europe constituent une entité à part, mangent et sortent en groupe ; même son de cloche pour ceux qui sont dans les pays du Golfe, tandis que les locaux sont tiraillés entre les deux. Ceci se reflète dans le jeu de ces derniers. Des incidents ont même eu lieu comme le cas de Safri, évoluant au Qatar qui a refusé de saluer Chamakh, qui évolue à Bordeaux en France. Des voix se sont élevées pour ne plus faire appel aux professionnels. Ils dénoncent le manque de patriotisme de ces derniers. Le public marocain, sorti en masse en 2004, est aujourd’hui plus que désespéré. Il est victime de la mauvaise prestation de son équipe nationale. Lors du dernier match contre le Cameroun, on entendait dans le stade des sifflements, des expressions de mécontentement, à tel point que quelques personnes ont préféré regarder un certain match Algérie- Egypte. Même le maillot marocain a été boudé. A Casablanca, des boutiques ont préféré mettre en vente le maillot des Fennecs d’Algérie, les seuls représentants de l’Afrique du Nord en 2010, à la place du t-shirt des Lions de l’Atlas. « Les gens n’achètent pas le maillot algérien juste par amour, mais également pour enrager nos joueurs nationaux », précise un vendeur.
Les Lions coûtent cher
Malgré l’argent qui coule à flot, et malgré tous les services et le confort dont jouissent les joueurs, les résultats ne suivent pas. Les joueurs de l’équipe nationale et l’entraîneur coûtent une fortune à la fédération de football. Ils ne sont privés de rien. Chaque année, la fédération débourse la « modeste » somme de 50 millions de dirhams. Bien sûr, la part du lion va à l’équipe A. Elle obtient entre 20 et 30 millions de dirhams par an. Les joueurs sont logés dans des hôtels 4 étoiles et plus. En 2008, au Ghana, la délégation marocaine avait choisi le même hôtel que le pays organisateur, un hôtel 3 étoiles. Mais les membres de la délégation officielle ont préféré changer d’hôtel. Ils ont opté pour un hôtel qui ne figurait même pas sur la liste des hôtels proposés par le comité d’organisation. Coût de l’opération : 1,4 millions de dirhams. Résultat, ils ont été sortis dès le premier tour avec une défaite cuisante contre ces mêmes Black Stars 2-0. Pendant la phase des qualifications, 6 millions de dirhams ont été distribués comme primes aux joueurs.
Mais ce n’est pas tout, les préparatifs coûtent aussi énormément. Pour le match amical contre la France à Paris, la fédération a payé 2 millions de dirhams et 2 millions supplémentaires pour les rencontres face à la Zambie et l’Angola. Au Ghana, la fédération a pris en charge les frais de transport de toute la délégation marocaine même de ceux qui ne faisaient pas partie de la délégation officielle. Ces derniers ont coûté 800 dollars par jour par personne. Les joueurs ont touché 120 dollars par personne et leurs accompagnateurs 240 dollars. Un safari a été organisé pour la délégation juste après la défaite contre la Guinée et la quasi-élimination de la CAN.
De plus, l’entraîneur coûte également une fortune. En dix ans, on a changé de sélectionneur onze fois. Le dernier en date, Roger Lemerre, érigé en sauveur, a déçu 30 millions de marocains. Mais lui n’était pas déçu de son salaire. Le bonhomme touchait 500 000 dirhams contre 350 000 dirhams pour celui qui a conduit l’équipe marocaine en finale de la CAN 2004. Badou Zaki. Lemerre avait droit à deux logements de fonction, une villa à Casablanca et un appartement à Rabat plus une voiture de fonction : le confort total. Mais aussi avec une absence totale de résultats.
Entraineur étranger Vs national
L’appel de certains professionnels de nommer un entraîneur national a été finalement entendu. Après le départ du Général Hosni Benslimane, ancien président de la fédération de football, et l’arrivée de l’actuel Ali Fassi Fihri, le bureau fédéral a nommé une équipe de quatre entraîneurs pour diriger l’équipe nationale pour le reste des qualifications de la coupe du monde et d’Afrique 2010. La débâcle contre le Gabon à Rabat a précipité le départ de Roger Lemerre. Le public mécontent avait même hué et lancé des bouteilles sur ce dernier. Mais la nomination des entraîneurs locaux a apaisé un peu les ardeurs. Le public s’est dit que tout reviendra comme en 2004, quand Badou Zaki régnait en maître. D’ailleurs, c’est ce dernier que les supporters voulaient voir à la tête des lions. Mais c’était sans compter sur le nouveau président. Il n’a pas cherché longtemps pour trouver ce qu’il voulait. Deux des entraineurs nommés sont issus du FUS, un club de la capitale propriété de Mounir Majidi, le secrétaire particulier du Roi. Hassan Moumen a été nommé le premier responsable des Lions tandis qu’Ammouta a été nommé adjoint avec deux autres entraîneurs, Abdelghani Naciri et Jamal Sellami.
Là aussi, les problèmes ont fait des ravages. Le premier obstacle était le problème des joueurs locaux et professionnels. Au début, on pensait que le changement de la direction technique allait rendre les choses plus flexibles, mais il s’est avéré que c’était tout le contraire. Certains joueurs ont même refusé de répondre à la convocation des entraineurs. Ils ont annoncé qu’ils ne joueront pas sous la houlette d’un entraineur amateur, en faisant allusion à Hassan Moumen. Le clash avait été déclenché lors de déclarations dans la presse de part et d’autres rejetant la responsabilité les uns sur les autres, bref un vacarme médiatique inutile. Mounir Hamdaoui, meilleur joueur de l’Az Alkmaar et buteur de l’Eredivisie en 2008, n’a pas pu trouver son pied au sein de l’équipe nationale. Il avait même une chance de briller et de se faire une place dans les cœurs des supporters mais il ne l’a pas saisi. Contre le Togo, il a raté un penalty d’une façon lamentable. Tout de suite après, il a été hué. D’ailleurs, il ne rejouera plus après cela, soit à cause d’une blessure parfois inventée pour fuir la pression, soit parce que son téléphone portable ne répondait pas. Hicham Aboucherwane, joueur de l’Ittihad Jeddah en Arabie saoudite, n’a pas voulu faire des échauffements pour remplacer son coéquipier durant le match Maroc- Cameroun à Fès. Ces incidents montrent bien le fossé qui existe entre l’entraineur et ses joueurs. La communication est considérée comme le premier secret de la réussite. La page du mondial et de la CAN 2010 a été tournée. Il faut dès maintenant se focaliser sur l’avenir, notamment sur la stratégie nationale proposée par le ministre de la jeunesse et des sports pour la mise à niveau du sport et surtout le football. L’avenir le dira.
*Chouha = Honte